jeudi 21 juillet 2011

GAMMA

- Profilage politique et idéologique - 

Je ne suis pas en vacances de blogue, et oui j'ai beaucoup à dire sur l'escouade GAMMA de la division du crime organisé du SPVM, escouade chargée d'enquêter sur les mouvements militants, disons-le, les mouvements militants de gauche.

J'ai toutefois décidé de le dire d'abord à « jepenseque.voir.ca ».


Montage:  Simon Jodoin



Vous êtes donc proudhonien ou proudhoniste? Eh, morbleu! vous avez un moyen simple de vous satisfaire. Jetez votre bourse dans la Seine, ne vous réservant que cent sous pour prendre une action de la Banque d’échange. 
– Frédéric Bastiat, Œuvres complètes, 1863, tome V, p. 64-93

Je représente les quatre jeunes militants étudiants arrêtés jusqu’à maintenant dans la foulée de la création de l’escouade GAMMA du SPVM.


 

Ils ont été arrêtés en lien avec deux manifestations contre la hausse des frais de scolarité qui ont eu lieu les 24 mars et 31 mai derniers, la première au bureau du ministre Bachand et la seconde dans les locaux de la CRÉPUQ. Deux de ces étudiants ont déjà comparu à la Cour municipale de Montréal pour répondre à des accusations de méfaits, de voie de fait, de complot, d’introduction par effraction, de prise de possession d’un lieu par la force. Tout porte à croire que les deux autres, qui vont comparaître à la fin juillet, feront face à des accusations semblables.

De ces quatre personnes arrêtées, trois sont membres de l’exécutif de l’Association pour une solidarité syndicale étudiante, l’ASSÉ, qui compte quelque 45 000 membres. L’autre est impliquée au sein de l’Association des étudiants en sciences humaines à l’UQAM, qui est proche de l’ASSÉ et de son exécutif.

La procédure

Les accusations sont portées par voie sommaire, c’est-à-dire par la voie d’une procédure allégée, qui ne permet pas aux accusés de bénéficier d’une enquête préliminaire ou d’opter pour un procès devant jury. Lors de telles accusations, ces choix ne s’offrent pas.
La peine maximale à laquelle ils s’exposent est de 5 000$ d’amende ou six mois de prison, peine plus douce que lorsque les accusations sont portées autrement.

GAMMA

GAMMA, pour «Guet des activités des mouvements marginaux et anarchistes», a tout pour inquiéter.

Il s’agit d’une escouade policière formée non pas pour enquêter sur des présumés terroristes, ou sur des présumés gangsters, mais sur des militants politiques. Le profilage idéologique, politique, est l’essence de cette escouade policière, puisqu’elle vise la surveillance d’individus pour leurs opinions et leur implication sociale.

Il est évident que les corps policiers peuvent surveiller des manifestations, il est évident que les corps policiers peuvent intervenir lors de manifestations où les esprits s’échauffent, tout comme il est évident que les policiers peuvent arrêter des individus qui commettent des actes criminels lors d’événements par ailleurs pacifistes. Dit autrement, les corps policiers québécois, même sans cette nouvelle escouade, étaient tout à fait en mesure de répondre aux besoins de sécurité lors de manifestations et autres activités militantes. La question n’est pas là.

La préoccupation des mouvements de défense des droits et libertés, c’est la constitution d’une escouade de répression des idéologies. Pourquoi GAMMA?

À la suite d’une conférence de presse tenue le 18 juillet par l’ASSÉ pour annoncer une contestation constitutionnelle de l’entité GAMMA, le porte-parole du SPVM Ian Lafrenière s’est permis trois énoncés inexacts, tendancieux, sinon mensongers.

Il a d’abord prétendu que GAMMA n’est pas une escouade permanente. (La Presse, 18 juillet, article de Vincent Larouche). Si tel était le cas, si GAMMA était une escouade composée de policiers qui font leur travail habituel tout en étant préparés à intervenir momentanément lors de manifestations houleuses, les arrestations auraient eu lieu au moment des événements reprochés.

Or, selon ce qu’on en sait, car le SPVM n’a jamais annoncé, expliqué ou justifié l’existence de GAMMA, l’escouade existerait depuis deux ans, et les arrestations ont toutes eu lieu dans les dernières semaines. C’est donc dire que les membres de cette escouade filent, épient, espionnent les individus qui participent à des manifestations et non pas seulement les manifestations elles-mêmes. Il ne serait pas étonnant, pas plus que cela ne relèverait d’un délire paranoïaque, de penser que leurs lignes téléphoniques soient écoutées, et leurs textos lus. Des micros lors des assemblées? Des agents policiers d’infiltration qui font mine de manifester? Fort probablement.

D’ailleurs, mes jeunes clients arrêtés ont été interrogés longuement non seulement sur leur implication, mais sur l’implication de ceux qui partagent les mêmes convictions qu’eux. Aussi, pour son enquête sur les activités de l’ASSÉ, l’escouade semble se servir d’un agent-source, c’est-à-dire d’un étudiant qui fait la sale besogne de donner ou de vendre des informations, qu’elles soient fausses ou pas, sur ses camarades. On ne peut pas parler d’une escouade ponctuelle avec de tels moyens d’enquête.

Le sergent Lafrenière a aussi prétendu que les étudiants n’ont pas été arrêtés «parce qu’ils ont tenu une réunion». Raisonnement rigolo. Personne ne prétend que le motif de l’arrestation est la présence à une réunion, ce qui ne veut pas dire que les discussions ne soient pas infiltrées, et que ce n’est pas justement par ces moyens totalitaires qu’on tente de réprimer non pas le crime mais le mouvement.

Enfin, histoire d’alarmer la population, le SPMV, toujours par la voix de son porte-parole Lafrenière, a prétendu que des quatre étudiants arrêtés, «certains étaient en possession de cocktails Molotov» (Radio-Canada, 18 juillet). Rien n’est plus faux. Les quatre étudiants ont été arrêtés en juin soit à la maison, soit au poste de police où ils se sont rendus volontairement après avoir été convoqués. Aucun d’entre eux n’était en possession de cocktails Molotov. Aucun. Ni lors de l’arrestation ni lors des manifestations du 24 mars et du 31 mai.

Mouvements marginaux et anarchistes

Il est outrageant de qualifier de marginal ou d’anarchiste l’individu qui s’implique collectivement dans la promotion et la défense des droits de la personne. Est-ce par manque de culture ou pour affoler le bien-pensant, manière subliminale de s’assurer de son appui, qu’on emploie ces mots non seulement injurieux mais anachroniques?

Un marginal est un inadapté, un paumé, un asocial. Plume dirait un malotru.

Un anarchiste, attribut galvaudé par les siècles, était un tenant d’une philosophie politique prônant l’abolition des hiérarchies et de l’État.

Mes clients ne sont pas anarchistes, ils sont étudiants. Et ils revendiquent des droits. Par les mêmes moyens que je le faisais à leur âge.






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